La Prusse et l’unification allemande


 
Claudio SchwarzLigne de crédit : Unsplash

Claudio Schwarz

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L'Allemagne n'a pas toujours été le pays que l'on connait aujourd'hui. Anciennement connue sous le nom de St Empire Romain Germanique, elle contenait environ 350 Etats. Au congrès de Vienne, en 1815, cet empire se transforme en confédération germanique, et ne contient plus que 39 Etats. Il faudra attendre 1871, pour parler d'une véritable Allemagne unie, incorporant dans son empire, la Prusse, qui eut un rôle majeur dans cette unification allemande. La Prusse est à l'origine un territoire d'Europe nord-orientale en partie germanisé, mais située hors du Saint-Empire romain germanique.

L’unification de l'Allemagne sous la forme d'un État-nation eut officiellement lieu le 18 janvier 1871 dans la galerie des Glaces du château de Versailles. Les princes allemands s'y rassemblèrent après leur victoire lors de la Guerre franco-prussienne pour proclamer Guillaume I de Prusse empereur du nouvel Empire allemand. Cette unification s'est faite en plusieurs étapes et cela sur le long terme; sous l'impulsion de la Prusse qui comme certains pays de la confédération a la volonté de créer un Etat Nation.

Nous verrons dans un premier temps une Prusse soumise et passive de 1815 à 1850, puis nous mettrons en exergue l’ascension considérable de la Prusse entre 1850 et 1860 ; enfin, nous poserons la Prusse comme véritable et unique meneur du peuple allemand.

 

1- Une Prusse soumise et passive malgré son statut de grande puissance (1815- 1850)

1.1- La création de la confédération germanique

En 1815, a lieu le congrès de Vienne, les pays vainqueurs de Napoléon se réunissent et prennent différentes mesures pour renforcer les puissances frontalières de la France. C'est pour cela que le St Empire Romain Germanique va etre dissout, celui-ci contenait un trop grand nombre d’Etats, nuisant à l’unité allemande. La confédération germanique va alors etre créée, réduisant considérablement le nombre d'Etats allemands. Elle eut néanmoins un rôle peu important à cause de son faible budget et de la non-constitution d'une véritable armée.

L’on perçoit alors certaines puissances émergentes comme la Prusse, pays vainqueur, qui va multiplier sa surface territoriale par 3, en récupérant la Saxe, la Poméranie suédoise, la Posnanie (Pologne) ainsi que la Rhénanie.

Une autre grande puissance se manifeste dans l’espace allemand : l'Empire Autrichien, qui récupère quelques territoires de la Bavière ainsi que la partie Nord de L'Italie et ses duchés.

En 1815, la Prusse, par le congrès de Vienne s'agrandie, et possède par conséquent une place plus importante. Cependant, l'Empire Autrichien est dominant par son vaste territoire et s'impose alors comme « leader » de cette confédération.

 

1.2- Les pays de la confédération germanique (1815)

La confédération germanique est composée de 35 Etats ainsi que de 4 villes libres. Cela représente environ 23,5 millions d'habitants comme nous l’avons expliqué précédemment.

Les deux grandes puissances à savoir la Prusse et l’Autriche sont dominantes d’un point de vue démographique, elles représentent plus de la moitié de la population de la confédération. La Prusse possède 7,5 millions d'habitants soit 35% de la population de la confédération. L’Autriche contient quant à elle, environ 9 millions d'habitants.

On perçoit des puissances dites « moyennes » à savoir la Bavière avec ses 3,5 millions d'habitants et le grand-duché de Bade qui compte un peu plus d’1 million d'habitants ; et des Etats plus petits comme le Royaume de Saxe ou encore le royaume de Thuringe.

Malgré ses atouts démographiques, la Prusse, semble être effacée par l'Autriche qui domine la confédération par sa grandeur, celle-ci souhaite d’ailleurs en être la puissance protectrice.

 

1.3- Les premiers troubles au sein de la confédération

On perçoit un certain nombre de troubles au sein de la confédération germanique à commencer par la création du Zollverein, l'union douanière de la confédération en 1834 qui exclue l'Autriche. Cela est perçu comme une provocation du coté autrichien.

Les troubles les plus notables sont les révolutions de 1830 et 1848, celles-ci marquent des phases de libéralisme dans les petits et moyens États. En effet les libéraux et les nationalistes se révoltent, dans le but de se réunir derrière l'Autriche, mais uniquement l'Autriche de la confédération germanique et non pas l'Autriche tout entière. L'Autriche va refuser, trouvant la situation inacceptable. Elle ne peut se résoudre à dissoudre son territoire.

Alors le parlement de Francfort, va proposer à la Prusse, de devenir la puissance exemplaire qui guidera cette confédération dans la réussite. Cependant, le roi de Prusse: Frederick Guillaume IV va refuser en mars 1849 car selon lui, ce sont les princes des Etats de la confédération qui doivent lui demander en personne et non pas les parlementaires. Il ne veut pas d'un "diadème de papier", il souhaite obtenir une certaine légitimité.

Viens alors le parlement de l'union d'Erfurt le 29 avril 1850, les princes se réunissent et vont alors comploter contre l'Autriche pour pouvoir s'unifier. Cette assemblée avait pour but de permettre la rédaction d'une constitution pour une future Allemagne unifiée sous la domination de la Prusse, dite solution petite-allemande, en opposition avec la solution grande-allemande où le nouvel État aurait été dominé par l'Autriche.

La conférence d'Olmutz est le nom d'un accord diplomatique qui a eu lieu le 29 novembre 1850 entre la Prusse, l'Autriche et la Russie qui mit fin aux tensions austro-prussiennes entre 1848 et 1850. Par cette conférence, la Prusse abandonne l'Union d'Erfurt, c'est-à-dire la mise en pratique de la solution petite-allemande, et accepte le retour à la Confédération germanique sous commandement autrichien.

L'Autriche reprends alors le pouvoir, l'union d'Erfurt apparait comme un échec mais enracine de nouvelles idées d'unification.

 

 

2- La Prusse connait une pente ascendante et commence à prendre conscience de son potentiel (1850- 1860)

2.1- Bismarck, artisan d'une nouvelle Prusse

L’arrivée au pouvoir de Bismarck semble être déterminante dans l’histoire allemande. Bismarck est à la fois ministre-président du royaume de Prusse de 1862 à 1890, chancelier de la confédération de l'Allemagne du Nord de 1867 à 1871.

Il lance le renouveau de la Prusse, en créant une armée solide, puissante, l'une des meilleures du monde à cette époque. La Prusse progresse et devient une puissance militaire majeure. De plus le chemin de fer se développe en Prusse, ce qui permet une meilleure communication au sein du royaume.

Otto Von Bismarck prône la realpolitik (de l'allemand : politique réaliste) désigne « la politique étrangère fondée sur le calcul des forces et l'intérêt national ». La realpolitik est, par principe, une gestion très diplomatique de la paix. Elle tend à éviter le recours à la course aux armements. Elle est basée sur une prise de décision en connaissance du maximum de données, en sauvegardant le maximum d'options.

Lors de la guerre austro-prussienne de 1866, Bismarck négocia l'alliance italienne pour attaquer l'Autriche et les États du Sud de l'Allemagne. Après la bataille de Sadowa, il s'abstint de demander des réparations pour permettre l'éclosion d'un Empire allemand sous l'autorité du roi de Prusse. Il se justifia à Guillaume Ier, roi de Prusse en 1861 : « Nous ne devons pas choisir un tribunal, nous devons bâtir une politique allemande. »

 

2.2- La baisse d'influence de l'Autriche

L’Autriche participe à la guerre d’Italie (1859-1861) où elle intervient massivement et connait de lourdes pertes. Elle en ressort très affectée et peine à se remettre en place. Elle n’a d’ailleurs pas participé à la guerre de Crimée de 1853 à 1856, du fait de ses nombreux affaiblissements militaires. Cela montre déjà les diverses difficultés que connait l’Autriche.

La guerre austro-prussienne de 1866 est décisive, elle met fin au conflit entre la Prusse et l’Autriche. Cette dernière, vaincue, s’effondre et permet à la Prusse de s’affirmer. Les dernières guerres ont véritablement usées l’Autriche, qui n’a pas pu s’imposer comme elle l’aurait voulu.

Elle sort de ces guerres, affaiblie, ce qui va profiter considérablement à la Prusse qui va alors tenter de s'imposer comme puissance incontournable de la confédération germanique.

 

3- Une grande partie des allemands menée par un seul pays: la Prusse (1860- 1871)

3.1- Guerre des 3 duchés

La guerre des 3 duchés est une guerre importante entre la Prusse et l’Autriche. Le Schleswig, Saxe-Lauenbourg, et le Holstein sont des duchés se situant au Danemark.

Au milieu du XIXème siècle, ces duchés se sentent davantage allemands, et ne souhaitent plus appartenir au Danemark, il y a alors une réaction immédiate de la Prusse et de L'Autriche, ces deux puissances vont s'allier et combattre contre le Danemark au nom des 3 duchés.

Cela va aboutir au traité de Vienne de 1864, c'est ainsi que la Prusse a pu faire une démonstration de sa puissance, en excellant durant cette guerre. La Prusse va obtenir 2 duchés: Schleswig et Saxe Lauenbourg; l'Autriche, quant à elle, va posséder le duché de Holstein.

Cependant en 1866, la Prusse de Bismarck va accuser l'Autriche de mal administrer son duché; ce qui va déclencher une guerre entre la Prusse et l'Autriche. En juillet 1866, l’on perçoit une victoire écrasante de la Prusse contre l'Autriche, il en découle alors un traité de paix signé par l’Autriche. La Prusse va prendre les 3 duchés ainsi qu’Hanovre, Nassau, Esse et la ville de Francfort. La confédération germanique est dissoute en 1866.

C'est par cette guerre des 3 duchés que la Prusse s’impose face à l’empire autrichien, et va s’inscrire comme puissance majeure de la confédération germanique.

 

3.2- Guerre franco-prussienne

Après la guerre des Duchés, Bismarck essaie encore de trouver un accord, sur des bases conservatrices, avec l'Autriche. Il met sur pieds une alliance avec les mouvements libéraux et nationaux afin de fonder un État allemand dominé par la Prusse seule.

La France s'inquiète de l'ampleur grandissante de la Prusse; Napoléon III va alors soutenir les états du sud allemands afin de tuer l'idée nationale. Le 3 juillet 1870, le prince allemand prussien, Leopold Hohenzollern, se porte candidat pour gouverner l'Espagne; la France refuse, Guillaume I, roi de Prusse, va alors renoncer à la candidature de Leopold.

Napoléon veut des assurances, choses que ne donne pas Guillaume I, de la façon la plus cordiale qu'il soit. Bismarck décide de relater l'évènement dans la presse, afin de mettre en avant les décisions soi-disant strictes du roi de Prusse.

De ce fait, la France déclare la guerre à la Prusse. Cette guerre devient alors franco-allemande. La France est alors présentée comme l'agresseur. Bismarck en profite et va utiliser la politique du « bouc émissaire » afin d'unifier les Etats allemands. La France, indirectement, va unir les Etats allemands autour d’une seule et même grande puissance : la Prusse.

Les prussiens se déplacent très facilement grâce aux réseaux ferroviaires développés par Bismarck; leur puissance militaire permet de triompher contre les français en Alsace, l'armée française réfugiée à Sedan va capituler et va signer le 10 mars 1871 un traité de paix à Francfort.

La Prusse devient par cette guerre un modèle et un leader pour les pays de l’ex-confédération germanique, elle a démontré sa force et sa grandeur à travers ses deux dernières guerres.

 

 

Au total, la Prusse a évolué au fil du temps, passant de puissance secondaire dans la confédération germanique à puissance centrale et majeure permettant d'unifier les pays de l’ex-confédération germanique. Elle a su, par bien des difficultés, s'imposer au détriment de l'Autriche. Elle prend ses responsabilités à partir de 1871, par la création de l'Empire Allemand, dirigé par un kaiser (Guillaume I). Cet empire est assimilé à un Etat fédéral (kaiser Reich), contenant alors 25 Landers (régions), 4 royaumes, 6 grands duchés, 5 duchés et 7 principautés. La Prusse est la partie centrale de cet Empire, et a joué un rôle décisif dans ce projet d' Allemagne unie, c'est elle qui en sera à la tête. La Prusse a alors réalisé sa destinée selon Bismarck.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Sacha Nizet