L’écriture inclusive, un débat de société


 
Ligne de crédit : Unsplash

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Depuis 2017, l’écriture inclusive déchaîne les passions dans le monde politique, associatif ou même dans la sphère privée. Les détracteurs pointent du doigt la destruction de la langue française et la complexité de l’écriture inclusive, tandis que les partisans défendent les valeurs d’égalité qu’elle permet. Au sein de tous ces débats, il est intéressant de creuser un peu plus la question de l’écriture inclusive en confrontant ses opinions et en se renseignant. Car, oui l’écriture inclusive n’est pas seulement l’utilisation du point médian, c’est une manière différente de communiquer sans stéréotype de sexe.

En se fondant sur les recommandations du Haut Conseil à l’Egalite entre les femmes et les hommes, on peut utiliser la langue française différemment afin de ne plus invisibiliser la femme. En effet, le français, contrairement à d’autres langues comme l’anglais et l’allemand, n’a pas de genre neutre à proprement parlé. Or, d’un point de vue politique, la langue joue un grand rôle et l’impact des mots sur notre société est très marquant. Pendant des siècles, les hommes mettaient de côté les femmes dans les métiers proches du pouvoir, et cette exclusion de la vie politique se ressent dans les termes employés «président » « avocat » « auteur » « médecin ». La grande règle de grammaire que nous connaissons tous « le masculin l’emporte sur le féminin » est un symbole du poids du patriarcat dans notre société.

D’aucuns me diront « oui, mais c’était comme ça à l’époque. Aujourd’hui, on fait toute une histoire alors que le vrai combat n’est pas là ». Il convient donc de faire un petit saut dans le passé. La règle de l’accord emporté par le masculin ne date que du XVIIème siècle, à une époque où la langue française était très politisée. Avant, les accords suivaient le fonctionnement de la grammaire latine, que l’on retrouve dans d’autres langues romanes. Tout est une question de politisation de la langue afin de promouvoir la supériorité masculine. « Lorsque les deux genres se rencontrent, il faut que le plus noble l’emporte », énonce Bouhours en 1675. « Le genre masculin est réputé plus noble que le féminin à cause de la supériorité du mâle sur la femelle », ajoute le grammairien Nicolas Beauzée en 1767. Cette formule, apprise dès le CP aux enfants, entraîne l’élaboration de représentations mentales avec une domination masculine. Il convient en effet à l’école et aux parents d’éduquer les enfants à ne pas faire d’amalgame. Mais comment voulez-vous que des personnes ayant intégré cette représentation, déjà intégrée par leurs aïeux, puissent empêcher ces représentations mentales hiérarchiques chez nos enfants ?

L’écriture inclusive souhaite donc combattre ces schémas mentaux et ces minimalisations de la femme, car oui les mots et l’usage que nous en faisons ont un impact très fort sur nos interlocuteurs. L’écriture inclusive fait débat car la vision qu’ont les gens se restreint juste au point médian. En réalité, l’écriture inclusive existe de différentes manières. On peut favoriser des mots épicènes, plus englobants que des mots masculins - « employés » devient « le personnel » - « les étudiants » devient « les élèves ». A quand, la déclaration universelle des droits de l’humain ? Cependant l’utilisation de mots épicènes est difficile car il n’y a pas assez de mots épicènes dans la langue française.

D’autres moyens sont utilisés comme le recours à la double-flexion, qui peut alourdir, « les collaborateurs et les collaboratrices », l’accord en genre des noms et des titres de fonction « la proviseure » « la cheffe », l’accord de proximité ou à la majorité. Il existe donc différentes alternatives pour vous aider à avoir des communications les plus inclusives possible. Bien-sûr, cela peut allonger les phrases, mais la langue française est suffisamment riche pour trouver des solutions adéquates.

Le point médian, qui est au cœur de chaque polémique concernant l’écriture inclusive, est une utilisation « mots-valises ». On prend le terme masculin dans son intégralité, on ajoute le point médian et on ajoute la fin du mot féminin. D’autres méthodes sont possibles, comme l’utilisation de termes non-binaire « iel = il+elle », l’accord au choix ou encore des typographies inclusives.

Alors, oui l’utilisation du point médian fait débat et peut même aggraver une discrimination déjà présente, celle des personnes dys qui ont des difficultés pour lire. Il faut donc favoriser l’utilisation de mots épicènes, ou réfléchir à d’autres tournures pour permettre à chacun de se sentir intégré dans la langue française.

Vous l’avez donc compris, l’écriture inclusive n’en a pas terminé avec les français, mais il faut aller bien plus loin que l’histoire du point médian. Il y a tout une réflexion derrière cette écriture, c’est devenu un moyen de lutter contre les discriminations. Alors, oui pour certains, c’est « laid », mais la beauté étant subjective, on ne peut pas appliquer ce sophisme (raisonnement par l’absurde) à tous nos citoyens. L’éducation des futures générations repose sur un travail conjoint avec le personnel enseignant et les parents. Les mots ont un impact sur leurs représentations mentales, c’est ainsi qu’ils se construisent. Si nous voulons œuvrer pour une société égalitaire, nous pouvons commencer par des représentations non discriminantes et des mots plus intégrants.

Marine