Le SAF, le syndrome dont il faut parler


 
Anastasiia RozumnaLigne de crédit : Unsplash

Anastasiia Rozumna

Ligne de crédit : Unsplash


Parfois, nous voyons des femmes enceintes de notre entourage refuser un verre d’alcool car « ce n’est pas conseillé pour le bébé ». Mais, savez-vous quels sont les réels risques encourus par le fœtus ? Avez-vous déjà entendu le terme d’alcoolisation fœtale ? Par cet article, nous vous proposons d’en apprendre plus sur ce syndrome pour qu’à la suite, vous puissiez instruire les autres…

 

Depuis 2007, les bouteilles d’alcool doivent avoir le logo interdit aux femmes enceintes sur leurs étiquettes. Mais, vous êtes-vous déjà demandé dans quel but ce logo était présent sur les bouteilles ? Pour comprendre, il suffit d’un mot « SAF », ou plus explicitement syndrome d’alcoolisation fœtale.

Le syndrome d’alcoolisation fœtale est une réalité de notre société dont nous n’avons pas réellement conscience. Pourtant, c’est la première cause d’handicap mental d’origine non génétique. 8000 enfants naissent par an en France avec des troubles causés par la consommation d’alcool pendant la grossesse dont 800 sont diagnostiqués SAF. Pendant longtemps, la consommation d’alcool était banalisée. Dans certaines régions, les publicitaires prônaient la « mère nourricière » consommant de la bière.

Aujourd’hui, 23% des femmes consomment de l’alcool quand elles sont enceintes. Peu ont conscience des risques encourus pour leur enfant. Malheureusement, les conséquences restent à vie, sans espoir d’évolution.

L’éthanol, présent dans l’alcool, franchit la barrière du placenta par diffusion passive. La mère ne ressent aucun effet, mais les répercussions ne se font pas attendre. En effet, le fœtus n’étant pas mature n’a pas les enzymes nécessaires métabolisant l’éthanol. L’élimination de la substance se fait par un retour dans le sang de la mère via le placenta puis passe dans le liquide amniotique qui a le rôle de réservoir. Le fœtus baigne littéralement dans l’alcool si la consommation d’alcool est rapprochée. Le taux d’éthanol de la mère est le même que celui du fœtus.

Contrairement à ce que l’on pourrait penser, un verre d’alcool suffit pour qu’il y ait une anomalie. En effet, même de faibles quantités d’alcool peuvent perturber le développement du fœtus.


En fonction du trimestre de la grossesse, la consommation de l’alcool a un impact différent. Dès le 20ème jour, la présence d’éthanol empêche la fermeture du tube neural perturbant la formation du fœtus. Pour une exposition au premier trimestre, le développement crânio-facial sera altéré entraînant une dysmorphie à la naissance. Les organes seront également atteints. Au deuxième trimestre, le bébé sera victime d’une hypotrophie et de troubles du comportement et d’un retard mental. Enfin, au troisième trimestre, la substance blanche sera lésée, le cerveau tournera au ralenti.

Dès la naissance de l’enfant, les conséquences se feront ressentir. L’alcool est responsable d’un faible poids, d’une augmentation de la mortalité périnatale, de naissances prématurés… Les nouveau-nés sont déjà en manque, ils ont une sensation de sevrage. Ils ont des troubles du sommeil, des problèmes de coordination visuomotrice et de succion.


Les caractéristiques physiques du SAF sont la dysmorphie, des anomalies congénitales dans 25% des cas, des problèmes cardiaux, ainsi que des problèmes physiologiques au niveau du squelette et des organes. Dans le cas d’un SAF très important, les enfants ont un philtrum convexe indistinct. C’est la zone au-dessus de la lèvre supérieure dessinant une petite dépression juste en-dessous de la cloison séparant les deux narines.

Au niveau du cerveau, des régions très importantes sont altérées comme l’hippocampe qui a un rôle dans la mémoire, le cervelet, zone de la motricité volontaire et de l’équilibre, et la moelle épinière qui transmet les impulsions du cerveau au reste du corps et qui contrôle le réflexe. Enfin, l’hypothalamus est touché, il est fortement impliqué dans la régulation de la faim, du sommeil, de la soif, du comportement et des émotions.

En grandissant, la microencéphalie persiste ou s’aggrave. En effet, le tissu se rétrécit à cause de pertes neuronales. L’enfant aura donc un retard intellectuel et des troubles caractériels irréversibles. Les enfants atteints du SAF seraient plus sujets à des problèmes judiciaires, scolaires et de consommation de drogues. On observe aussi des problèmes d’apprentissage au niveau spatial, verbal ainsi que dans la reconnaissance des visages et de la mémoire de travail. Il y a également des troubles d’acquisition du langage avec un retard du langage oral, du langage écrit et de la lecture. L’attention est touchée elle-aussi.

Il est important de souligner que toutes les expositions à l’alcool pendant la grossesse ne sont pas responsables d’un SAF. En effet, il existe des troubles plus légers que le SAF suite à une exposition modérée à l’alcool. Ce sont les ETCAF, c’est-à-dire des Troubles Causés par l’Alcoolisation Fœtale. Ils sont caractérisés par des fragilités physiques provoquant un retard de croissance pré ou postnatal, des anomalies crâniofaciales, des malformations du cerveau et des dysfonctionnements du système nerveux central. Ces altérations entraînent un retard de développement intellectuel, des problèmes d’apprentissage et de mémoire, une hyperactivité, et des troubles de l’attention.

Le syndrome d’alcoolisation fœtale n’est pas génétique, il est donc évitable. Cependant, peu de personnes connaissent les véritables conséquences catastrophiques d’une consommation d’alcool pendant une grossesse. Mais, ce sont des conseils, des marques d’attention ou la prévention qui permettront d’alerter les futures mamans et leur entourage. Nous sommes tous acteurs de notre santé mais aussi de celles des autres, c’est par la communication et la sensibilisation que nous pouvons agir.

Marine

 

 

Bibliographie :

Evelyne Muggli, Harold Matthews, Anthony Penington (2017), Association Between Prenatal Alcohol Exposure and Craniofacial Shape of Children at 12 Months of Age, doi:10.1001/jamapediatrics.2017.0778

Olivier Pierrefiche, 2018, Le syndrome d’alcoolisation fœtale comme exemple de pathologie neurodéveloppementale