Retrouvailles


La forêt frissonne sous le souffle de la brise, on n’entend rien que le bruissement des feuilles. La nature toute entière se repose, le calme règne ce soir. Il fait nuit noire et rien ne présage de ce qui vit dans les bois. Le hululement d’une chouette soudain perce le silence. C’est comme le signal du déclenchement d’une tempête de bruits qui brusquement, surgissent de partout puis d’un coup s’apaisent. Les arbres laissent la place à une clairière, tâche claire au milieu de cette sombre sylve. Une rivière coule à travers, le murmure de l’eau, glissant sur les galets et sur le sable fin, résonne dans cette étendue verdoyante en paix.


Dans le ciel, une étoile apparaît, pâle lueur qui n’arrive pas à éclairer la nuit. Mais une myriade de lumières s’allume petit à petit et la voûte céleste illumine et transforme en lieu féérique cette forêt si noire un instant auparavant. Sous l’immensité de ce ciel constellé d’étoiles, deux personnes marchent calmement, ne craignant pas cette nature qui leur offre un magnifique spectacle tout en délicatesse. Ils se tiennent la main simplement ; ils ne parlent pas, craignant de rompre le lien « magique » qui les unit et le silence qui les entoure. Ils s’arrêtent, écoutent, mais rien, aucun bruit ne trouble la paix du soir, si ce n’est le clapotis de l’eau.


Ils se regardent, leurs yeux purs brillent dans l’obscurité, comme des étoiles qui se seraient échappées du ciel pour éclairer leurs regards. Ils sont heureux, ils s’aiment. La première silhouette frissonne, aussitôt l’autre la serre contre lui. Ils restent là dans les bras l’un de l’autre. La jeune femme soupire puis ferme les yeux, blottie contre son compagnon. Celui-ci ne dit rien mais il la contemple avec admiration. Comment ne pas l’aimer ? Elle est si belle !!! Si fragile mais si forte à la fois, pour lui c’est une perle rare qu’il chérit de tout son cœur. Comme il a été heureux lorsqu’elle lui a dit oui, un beau jour d’été. Ils sont là maintenant, tous les deux, ensemble. Rien ne peut les séparer. Leur amour est si puissant qu’ils pourraient déplacer des montagnes. Ils se sont battus pour en arriver là sans jamais perdre courage même si les derniers mois ont été éprouvants. Cet instant qui les unit semble durer une éternité mais ils ont un bout de chemin encore à faire. Alors comme à regret, ils s’écartent l’un de l’autre et se remettent en marche sans se lâcher, ils ne le veulent pas.


Après quelques minutes, ils arrivent près d’un lac. La lune se reflète dans ces eaux sombres que rien ne trouble si ce n’est un léger souffle de vent. Sur la rive, une petite maison dont s’échappe un mince filet de fumée, se tient là devant eux. Ils sont arrivés au terme de leur voyage. Ils contemplent, éblouis, ce havre de paix dont la beauté les enchante. Au fond d’eux, ils se disent que de jour, cela doit-être encore plus merveilleux car le soleil illumine l’endroit. Tout semble à sa place en harmonie, aucun corps étranger, même la maison se fond dans le décor. Au loin, une légère brume s’avance sur le lac, telle un fantôme qui hanterait les lieux. Ils comprennent pourquoi « elle » s’est établit ici. Le calme environnant les apaise, une douce mélancolie se répand, et le souffle mélodieux du vent à travers les sapins se fait entendre. La symphonie de la nature se révèle dans toute sa splendeur.


Ils parviennent à la porte et sonnent. La petite cloche tintinnabule joyeusement dans le silence de la nuit. La porte s’ouvre et une jeune femme apparaît dans l’embrasure de la porte. Aussitôt qu’elle les reconnaît un sourire illumine son visage fatigué. Elle irradie d’une joie profonde et pure. Ses yeux s’embuent, elle semble si frêle. « Vous êtes là ! » Ces simples mots prononcés d’une voix tremblante renvoient tous les sentiments : espoir, crainte, attente… Elle n’ose y croire et pourtant ce sont bien eux. Combien de fois s’est-elle retenue de les appeler par crainte de les déranger ? Combien de fois a-t-elle pleuré, la solitude l’envahissant ? Et maintenant, ils se tiennent devant elle, le sourire aux lèvres. L’autre femme ne dit rien mais la prend doucement dans ses bras. Aussitôt des perles d’eau jaillissent et coulent silencieusement sur ses joues. Seuls témoins de cette scène, le clair de lune qui les éclaire et les étoiles semblables à des diamants bruts.

Les deux voyageurs l’entraînent calmement à l’intérieur. L’homme referme la porte et sa compagne guide leur hôte à travers la pièce qu’un feu de cheminée réchauffe faisant fuir les ombres environnantes. Assis dans leurs fauteuils, une tisane à la main, durant toute la nuit ils parlent. Ils se racontent tout ce qu’ils ont vécu depuis leurs derniers moments passés ensemble, il y a si longtemps. La crise semble bien loin à présent, ils peuvent se voir, exprimer ce qu’ils ressentent en toute transparence. Ces longs mois d’isolement se sont écoulés si lentement, remplis d’angoisse et de tristesse, et pourtant ils ont tenu. Ils sont là ensemble, prêts à avancer dans ce monde nouveau qui s’offrent à eux.

Marie Ouazana