Lili Keller-Rosenberg, une enfant revenue des camps


Lili Keller-Rosenberg, survivante du camp de Ravensbruck, à Auxerre en juin 2019, Jérémie FULLERINGER

2022. Nous vivons les dernières heures des camps de la mort nazi. En effet, 77 ans après la fin de la Seconde Guerre mondiale et la découverte par les Alliés du système concentrationnaire, les témoins directs se font de plus en plus rares. D’ici une décennie, plus personne ne pourra transmettre de vive voix ce que furent les horreurs des camps.

Mais, en France, nous sommes chanceux, car certains de ces témoins, victimes, ont encore à cœur de faire passer leurs souvenirs et leurs convictions, pour que ceux-ci restent vivants dans l’esprit des plus jeunes.

Lili Keller-Rosenberg est l’une de ces personnes. Inlassablement, depuis 1983, elle arpente le Nord de la France pour témoigner auprès des plus jeunes de ce qu’elle a vécu.


Née en 1932 à Croix dans le Nord, elle vécut entre Octobre 1943 et Avril 1945 la déportation, d’abord en Belgique, puis à Ravensbrück et Bergen-Belsen. Elle fut libérée finalement par les Anglais à l'âge de 12 ans, avec ses 2 frères et sa mère. L’une des très rares fratries à revenir complètes des camps. Son père, déporté à Buchenwald, fut fusillé 3 jours avant la libération du camp.

De retour en France, elle mit des décennies avant de pouvoir parler à coeur ouvert de ce qu’elle y a vécu. En 2021, elle publie sa biographie, son témoignage, intitulé Et nous sommes revenus seuls, dans lequel elle nous fait revivre à travers ses yeux d’enfant l’horreur concentrationnaire, entre misère, humiliation, faim, violence, incompréhension, inhumanité et mort.

Elle nous retrace sa vie, de la jeunesse quasi idyllique d’avant guerre à sa très longue reconstruction, en passant par son arrestation, la force de sa mère dans les camps ou sa relation avec ses deux jeunes frères. Ce témoignage est unique car elle n’était encore qu’une enfant, de 10 à 12 ans, auquelle les nazis ont tout pris. Une colère et une tristesse très particulière nous prend lors de la lecture, face à l’inimaginable devenu routine, l’enfance volée.

Et aujourd’hui, Lili Keller-Rosenberg est engagée dans le partage de cette expérience auprès des plus jeunes, allant de collèges en lycées pour témoigner et informer sur des événements qui ne sont pour beaucoup plus que des lignes dans un livre d’histoire. Cela fait maintenant 40 ans que cette dame est devenue une passeuse d’histoire, engagée à ce que tous comprennent l’envergure de cette folie, engagée à lutter contre ce qui l’a provoqué : antisémitisme, xénophobie, racisme ou encore intolérance.


Imaginez le courage et l’abnégation qu’il faut pour, sans relâche, revivre encore et encore ces événements qui lui ont pris son père, son enfance et tellement plus, dans l’objectif d’être entendue par les plus jeunes, pour que son message passe les générations sans s'essouffler.

Je vous invite à lire ce livre hors du commun, ou à écouter cette dame parler de ce qui lui tient à cœur avec tant de convictions.

Pour que plus jamais personne ne doive vivre cela.

Nicolas Graingeot


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