Sans un aveu, sans un adieu


Crédits : Unsplash (Karen Cann)


           Il faut qu’il se confie, non au prêtre ancien, encore moins au prêtre moderne… A qui exactement ? Il le faut nécessairement… car il se l’est promis à lui-même secrètement, inconsciemment même : son corps s’exprime à son insu. Que de signes à découvrir ! Que de cachotteries ignorées ou inavouées ! Il s’engage dans une aventure dangereuse… mais avant tout, se confier ! A qui se confier ? Les confidences… qu’elles soient jetées hors de nous, qu’elles restent en nous ou qu’elles soient oubliées : changeront-elles la face du monde et le visage de cet être ? Le monde s’en fout ! Mais peut-être que lui sera changé. Peut-être aura-t-il le regard honteux. Peut-être sera-t-il libéré de sa mauvaise conscience. Qui peut le savoir ? Qui peut en décider ?

          Pourquoi faut-il qu’il honore sa promesse de se confier ? Il ne l’a dit à personne, il ne l’a même pas pensé si fort. Il pense davantage à remplir son gros ventre et à satisfaire ses sens. Il sourit… personne n’est au courant ! pas même cette vieille dame qui passe devant lui avec son manteau noir. Il faudrait presque qu’il soit forcé, que quelqu’un le torture, lui enlève les ongles un par un avec cruauté…

          « Il faut vivre et ne pas penser à sa vie », pouvait-il penser. Voilà une formule qu’il va se répéter, jusqu’à ce qu’elle fasse intégralement partie de lui… jusqu’à vomir ! Car il le faut pour lui ; il faut que son existence se résume en quelques formules, sans quoi il perdrait pied. A cela s’ajoute une certaine dose de plaisanterie car il faut bien rire pour se supporter soi-même mais aussi pour supporter les autres.

          C’est décidé ! Il gardera tout en lui ; ou alors il se confiera à des choses muettes, comme à cette cathédrale en face de lui. Oublions les confidences ! Il n’a rien à se reprocher, du moins pas plus qu’un autre. Peut-être vivra-t-il mieux ainsi. Peut-être pourra-t-il accomplir l’œuvre d’un solitaire.

          Mais… que fait-il donc ? Il s’avance à présent vers la cathédrale si majestueuse. Il la contourne, arrive à son cul… il va lui parler ! Il lui parle… que lui dit-il ? Sans aucun doute des rigolades plus ou moins malsaines… Non ! Il lui parle sérieusement ! La cathédrale l’entend-il ? Et Dieu ? 

        Il se retourne enfin pour rebrousser chemin et tombe nez à nez avec un enfant qui l’observe avec de gros yeux. Quelqu’un a entendu ! Personne n’aurait dû entendre ! Il part alors : quels sentiments le traversent ?

         Il s’éloigne de la cathédrale. Il marche, encore et encore… il quitte la ville, sa ville… sans un aveu (si !), sans un adieu.

Jean


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